Le paiement des charges communes (ou des frais de condo) constitue probablement l’obligation la plus connue de la part d’un copropriétaire. Lors de la visite d’un condo à vendre, une des questions principales des potentiels acheteurs consiste à savoir quel sera le montant qui devra être déboursé mensuellement pour le paiement des charges communes. En effet, personne ne veut payer un montant élevé et on accorde souvent à un immeuble où les frais de condo sont bas une importance accrue. Mais c’est souvent dans ces cas que le fonds de prévoyance s’avère insuffisant.
Habituellement, cette perception de la copropriété ne correspond pas au reflet d’une administration de l’immeuble qui se veut saine et efficace.
En vertu de l’article 1064 du Code civil du Québec, on établit le principe de base à l’effet que :
« chacun des copropriétaires contribue, en proportion de la valeur relative de sa fraction, aux charges résultant de la copropriété et de l’exploitation de l’immeuble, ainsi qu’au fonds de prévoyance constitué en application de l’article 1071(…) ».
Ainsi, c’est justement l’article 1071 du Code civil du Québec qui stipule que :
« le syndicat constitue, en fonction du coût estimatif des réparations majeures et du coût de remplacement des parties communes, un fonds de prévoyance, liquide et disponible à court terme, affecté uniquement à ces réparations et remplacements. Ce fonds est la propriété du syndicat ».
Enfin, l’article 1072 du Code civil du Québec indique comment la contribution aux charges communes est établie :
« annuellement, le conseil d’administration fixe, après consultation de l’assemblée des copropriétaires, la contribution de ceux-ci aux charges communes, après avoir déterminé les sommes nécessaires pour faire face aux charges découlant de la copropriété et de l’exploitation de l’immeuble et les sommes à verser au fonds de prévoyance. La contribution des copropriétaires au fonds de prévoyance est d’au moins 5 p. 100 (5%) de leur contribution aux charges communes. Il peut être tenu compte, pour l’établir, des droits respectifs des copropriétaires sur les parties communes à usage restreint (…) ».
Par la lecture de ces trois (3) articles, on constate que les charges communes peuvent être divisées de deux façons : les charges communes pour les dépenses journalières, et celles reliées aux réparations majeures et au coût de remplacement des parties communes qui seront déposées dans le fonds de prévoyance.
Les sommes dans le fonds de prévoyance ne peuvent donc pas servir à autre chose qu’à ce qui est prévu dans la loi. Ainsi, il est notamment interdit de piger à même ce compte pour :
- payer un fournisseur ayant rendu des services à la copropriété,
- payer des honoraires professionnels dus à un avocat ou un notaire,
- pour payer quoi que ce soit relié à la gestion courante de la copropriété.
Si une dépense imprévue s’avère trop élevée pour être payée à même les sommes du compte courant, les administrateurs devront demander une cotisation spéciale à l’ensemble des copropriétaires afin de pallier au manque d’argent.
Un autre comportement souvent constaté dans les immeubles tenus en copropriété divise est de se limiter au pourcentage minimum prévu à la loi pour la contribution au fonds de prévoyance. Ainsi, les administrateurs se contentent de demander cinq pourcent (5%) des contributions aux charges communes et se considèrent ainsi satisfaits de respecter l’article 1072.
Conformément à l’article 1071, le syndicat doit établir ce fond basé sur le coût estimatif des réparations majeures et du coût de remplacement des parties communes. La meilleure façon de procéder demeure pour le Syndicat d’établir un carnet d’entretien où, avec l’aide d’un professionnel, il pourra être établi une liste des parties communes de l’immeuble et leur durée de vie approximative.
Par exemple, s’il est établi par un ingénieur que la toiture a une durée de vie de 10 ans et que son coût de remplacement est évalué à 20 000 $, le Syndicat pourra fixer pour cet élément précis une contribution annuelle de 2 000,00 $ pour les dix prochaines années, ce qui assurera la mise à disposition des fonds requis au moment des travaux correctifs. Il pourra faire de même pour chacune des parties communes. Cette façon de procéder permettra de réaliser que le pourcentage minimum légal est souvent insuffisant pour assurer la pérennité de l’immeuble.
Par conséquent, il est important de s’assurer que le fonds de prévoyance est correctement approvisionné en permanence. Les sommes déposées serviront à assurer qu’au moment venu, les réparations majeures des parties communes pourront être faites sans avoir à demander une cotisation spéciale aux copropriétaires.
Les futurs acheteurs de condo doivent bien avoir conscience que des charges communes élevées afférentes aux parties privatives souhaitées est possiblement une bonne indication positive. Celle qui montre que le fonds de prévoyance est sérieusement entretenu, le tout sous réserve des vérifications nécessaires.
Maître Karl De Grandpré
Azran Avocats