Lors de l’achat d’une maison, il y a un principe maintenant bien connu à l’effet que le vendeur est tenu de garantir à l’acheteur que la propriété est exempte de vices cachés. Toutefois, conformément à l’article 1726 du Code civil du Québec, « il n’est, cependant, pas tenu de garantir le vice caché connu de l’acheteur ni le vice apparent; est apparent le vice qui peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert ».
Ainsi, dans le cas d’une situation où un vice serait découvert suite à l’achat sans que l’acheteur ait procédé à une inspection, il pourrait être difficile de faire la preuve du type de vice (caché ou non) car le vendeur pourrait notamment alléguer qu’il y avait des indications visuelles qui démontraient que le vice était déjà présent. Sans la preuve d’un professionnel pour contredire les allégations du vendeur, les chances de réussite d’un recours devant les tribunaux seront grandement diminuées.
Dans la même optique, il y a une disposition dans la Loi sur le courtage immobilier ainsi que ses règlements d’application qui a été adoptée dans le but de protéger le public. En effet, l’article 81 du Règlement sur les conditions d’exercice d’une opération de courtage, sur la déontologie des courtiers et sur la publicité stipule que :
« Le courtier ou le dirigeant d’agence doit recommander à la personne qui se propose d’acquérir un immeuble d’en faire effectuer une inspection complète par un professionnel ou un inspecteur en bâtiment qui :
1) détient une assurance responsabilité professionnelle contre les fautes, erreurs ou omissions;
2) utilise une convention de service d’inspection reconnue;
3) effectue ses inspections conformément à une norme de pratique de l’inspection en bâtiment reconnue;
4) remet un rapport écrit à la partie qui utilise ses services.
Le courtier ou le dirigeant peut fournir une liste de professionnels ou d’inspecteurs en bâtiment qui respectent les exigences prévues au premier alinéa et qui contient plus d’un nom » (les soulignés sont du soussigné).
Comme on peut le constater, un courtier immobilier a l’obligation de faire la recommandation à son client de procéder, par l’entremise d’un professionnel, à une inspection préachat, mais c’est toujours le client qui prendra la décision finale. Toutefois, on constate que cette obligation est conditionnelle à l’indication des quatre conditions indiquées ci-haut, lesquelles sont essentiellement formulées dans le but d’assurer que le client engage un professionnel compétent détenant une assurance-responsabilité. Ainsi, dans l’optique où le courtier explique adéquatement toutes les obligations légales qui découleront de la décision qui sera prise par son client, son obligation sera rencontrée.
Par ailleurs, le courtier n’a pas une obligation de fournir une liste de professionnels à son client. Il a la possibilité le faire, mais il n’a pas le devoir de le faire. Un courtier en affaires depuis plusieurs années aura souvent plus de facilité à soumettre des contacts professionnels à son client qu’un courtier débutant. Et bien entendu, le client appréciera toujours cette attention de son courtier puisque ça lui évitera d’effectuer des démarches à cet effet.
Par contre, il est obligatoire pour le courtier de respecter les deux règles suivantes lorsqu’il soumet une liste à son client : recommander un inspecteur qui respectera les quatre exigences prévues à l’article 81 du Règlement et proposer une liste d’inspecteurs en bâtiments à son client qui comporte plus d’un nom. Ainsi, le courtier ne peut pas diriger son client vers un inspecteur unique, malgré le fait qu’il soit reconnu, car il engagerait sa responsabilité professionnelle.
En conclusion, on constate que la loi n’oblige donc pas à ce qu’une inspection préachat soit réalisée avant l’acquisition d’une propriété. Par contre, afin d’éviter des tracas et des dépenses inutiles en réparations de vices, nous considérons qu’il est essentiel que tout acheteur diligent procède à une inspection préachat. Le courtier immobilier a donc un rôle important dans ce processus afin de s’assurer que son client soit accompagné lors de l’inspection de sa future propriété par un inspecteur reconnu.
Maître Karl De Grandpré
Azran Avocats